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Histoire

L’importance de la charte du 9 décembre 999

En 999, Saint-André est un poste militaire romain, entouré d’un domaine agricole dénommé « la Roche ».

À cette époque, la Provence et la région de Nice vivent une période troublée.

Non loin de Nice, Miron et son épouse Odile possède un fief près de Cimiez, riche d’une villa, une vaste ferme entourée de terres. Le lieu a pour nom Roc Saint-André.

Miron et Odile décident de rédiger leur testament et n’oublient pas dans leur succession de se montrer généreux envers le monastère voisin, qui recevra à leur mort « le quart du domaine que l’on appelle Roc Saint-André ».  Il s’agit, dans l’Histoire, de la première mention officielle du domaine qui deviendra Saint-André de la Roche, village plus que millénaire du comté de Nice…

Voici le texte intégral, traduit du latin, de ce document :

« L’autorité ecclésiastique demande et la loi romaine impose que, quiconque veut transférer son bien à un pouvoir (destinataire) quel qu’il soit, établisse cela par testament afin que soit assurée la perpétuité et la certitude de la donation au cours du temps.

Aussi moi Miro et mon épouse Odile, comptant de concert sur la miséricorde de Dieu et sur l’éternelle rétribution acquise par le Christ, craignant le jour du jugement et voulant mériter d’entendre la voix de Notre Seigneur Jésus Christ qui dira « Venez les bénis de mon Père, recevez le royaume qui a été préparé pour vous depuis l’origine du monde » et pour que Saint-Pierre qui a le pouvoir de lier et de délier les âmes nous absolve des liens de tous nos pêchés, par amour et par crainte, nous donnons au Seigneur Dieu et au saint monastère qui fut édifié en l’honneur de saint Pons martyr par le pieux Charles, roi des Francs et patrice des Romains, dans ce comté de Nice, près du lieu nommé Cimiez, au-dessus du fleuve Paillon, nous donnons donc au dit monastère, soit aux moines qui le desservent nuit et jour, la quatrième partie du terroir que l’on nomme Rocha, avec toutes ses dépendances et ses adjacents, à savoir les terres, les champs, les forêts, les vignes, les prés, les pâturages, les arbres fruitiers et non fruitiers, les moulins, les eaux et les ruisseaux, et tout ce qui normalement appartient à ce terroir.

Ce territoire se trouve dans le comté de Nice, au-dessous du château antique dit de Revel. Nous voulons qu’à partir de ce jour et perpétuellement, tout ce que nous avons mentionné ci-dessus devienne la propriété dudit monastère, afin que les « serviteurs » de celui-ci le tiennent et le possèdent et qu’ils veuillent bien tous les jours prier le Seigneur et le supplier pour le salut de nos âmes et de celles de tous ceux qui ont la vraie foi, pour tous ceux qui craignent Dieu et aussi pour tous les bienfaiteurs.

Cette charte à but charitable a été rédigée le samedi 5 des ides de décembre (9 décembre), l’an depuis l’Incarnation de notre Seigneur Jésus Christ 999, indiction  12e, l’an 7e du règne glorieux de Rodolphe.

Fait au château de Lurs, en présence du seigneur évêque Froddonius.

Signatures de Miro et d’Odile, qui ont fait rédiger cette charte et qui ont demandé aux témoins et à leurs fils de la confirmer.

Pons, Bermond et Miro, leurs fils, témoins.

Le prêtre Lambert, témoin ; le lévite Sauveur,  témoin ; le prêtre Bermond, témoin ; Pons, témoin ; Inghilbert, témoin ; le prêtre Jean, témoin. »

Ce don fut fait avec le consentement de Pons, Bermond et Miron, fils de cette famille bienfaitrice de l’abbaye, en présence des personnalités marquantes de la région et sous contrôle de Froddonius, évêque de Nice, dont c’est ici la seule mention de ce pontife, inconnu par ailleurs.

La charte contient la donation du quart de la Roche, sise sous l’ancien château de Revel, dont on voit encore les ruines sur le chemin de Nice à Tourrette-Levens.

L’acte, conclu au château de Lurs, dépendance de l’évêque de Sisteron, sous le règne du roi Rodolphe, fut signé par les bienfaiteurs, leurs enfants et les personnes présentes.

Famille Thaon de Revel

Les Thaon entrent dans l’histoire de Saint-André par le mariage, dans les premières années du XVIIe siècle, de Pierre Thaon, médecin du duc de Savoie, avec Camilla Michelotti, héritière du fief de Saint-André. Il en devient le seigneur en 1611, et ce, jusqu’à sa mort en 1635. Son fils aîné, Charles-Antoine qui avait épousé en 1634 Lucrèce Galléan, lui succède.

Charles-Antoine laisse deux fils. Mais l’aîné n’a que deux filles et c’est la branche issue du cadet, Pierre-Antoine qui maintient le nom. Ce Pierre-Antoine, qui avait épousé Constance (ou Cassandre) Chabaud, conclut en 1685 avec le sénateur Peyrani, dont la fille a hérité du fief de Tourrette, une transaction qui assure aux Thaon la possession d’un quartier de Tourrette, le lieu-dit Revel.

En 1687, le duc de Savoie érige en comtés les deux fiefs de Saint-André et de Revel, de telle sorte que Pierre-Antoine devient comte de Thaon de Revel. A cette époque, les Thaon ont réaménagé le joli château de Saint-André sur une terrasse qui domine le Paillon et dont on admire encore aujourd’hui les beaux plafonds peints.

Gaspard, qui avait épousé le 31 janvier 1690 Gertrude Provana, est ambassadeur du duc de Savoie auprès de Louis XIV. Il meurt le 7 février 1711 et l’héritage revient au petit-fils de Pierre-Antoine, Joseph Horace. Il est 1er consul de Nice en 1748, au temps de l’occupation hispano-française et le redevient en 1765. Il avait marié en 1755 son fils aîné, Charles-François, à Madeleine Galléan d’Ascros. Ce fils, colonel du régiment provincial de Nice, est admis dans l’Ordre de Malte où on le gratifie d’une commanderie. Il devient ler consul de Nice en 1776, puis sa carrière se poursuit dans l’armée et la haute administration : commandant général de Nice et du comté de 1780 à 1787, vice-roi de Sardaigne jusqu’en 1790. En 1792, à 67 ans, il est appelé au commandement de l’armée sarde qui tente d’opposer une résistance aux troupes révolutionnaires françaises dans les Alpes. Pendant ce temps, ses biens – dont le château de Saint-André – sont nationalisés et vendus.

Après le traité de Paris de 1796 ramenant la paix entre la République française et le roi de Sardaigne, Charles-François est fait marquis en 1800.
Le titre passe à la branche de son fils cadet, Ignace, qui devient ministre de Sardaigne auprès de Louis XVIII et hérite du titre de comté de Pralungo. Le cours des événements et la réunion de Nice à la France en 1860 devaient amener les descendants d’Ignace à suivre les nouvelles destinées de la maison de Savoie. Ils occuperont les plus hautes charges, notamment dans la marine et la diplomatie italiennes.

Le titre de Revel accolé au patronyme Thaon perpétue le souvenir de leurs origines niçoises.

Lou pais dei babi

Il était de coutume jadis, dans le Comté de Nice, d’affubler chaque village d’un qualificatif de dérision. Ainsi les jeunes avaient-ils de quoi s’invectiver copieusement lors des fêtes votives estivales, les Faliconiers se faisant traiter de « mangia-céba » (mange-oignons), les Arianencs de « bétous » (boueux) et les Saint-Andréens de « Babi » (crapauds).

D’où nous vient ce qualificatif peu flatteur de prime abord ?

Certainement du caractère très humide de notre vallée où, effectivement abondent les batraciens : grenouilles ou crapauds dont les chants agrémentent encore les paisibles nuits d’été. Peut-être aussi du fait du nombre important d’immigrés italiens qui repeuplèrent le centre du village après la Grande Guerre, piémontais ou toscan que les autochtones traitaient souvent de crapauds. Depuis quelques années le sobriquet infamant est devenu un titre de noblesse pour les partisans de l’identité Saint-Andréenne, « lou pàis dei babi », c’est notre pays et nous y sommes tous très attachés.
De toute façon, la science nous dit que le crapaud est un excellent père de famille, très attentionné ; de plus il vit retiré dans son coin sans faire de bruit, sans se faire remarquer, heureux quand il est caché.
N’est-ce pas là de bons adjectifs pour qualifier les habitants du Val de Banquière ?

Notons que Pierre Isnard dans l’Armanac Nissart de 1928, consacré aux sobriquets des habitants de divers villages et villes du Comté, ne cite pas la « noumenaia » Babi pour les gens de Saint-André (appellation qu’il attribue aux habitants de La Madeleine). Mais il en donne plusieurs autres : AIGAIOUS, en raison du lieu frais et humide et des nombreux ruisseaux qui descendent des collines avoisinantes. Il les nomme aussi DESTRUJA-ROCCA, les carrières ouvertes sur le territoire de la commune en étant la raison. Enfin, « les habitants de Saint-André cultivant dans leurs campagnes de nombreux sorbiers dont les fruits ont, on le sait, des vertus astringentes, on appelle ces infortunés des SCULIBA-CUOU ».
Dans les alentours immédiats, toujours pour P. Isnard, les habitants de l’Abadie supérieure sont les « STASSIONARI », le lieu étant une impasse au-delà de laquelle il est impossible d’aller. (A moins qu’il s’agisse d’un camp romain où stationnaient des troupes ? ). Les gens de l’Abadie inférieure étaient surnommés les COULOUNIE, les derniers tisserands de la région y demeurant à l’époque. (en niçois coulougna = quenouille). Enfin les habitants de l’Ariane, en raison du limon abondant, étaient les BETOUS (beta = boue). Là encore de nombreux ruisseaux, lu raiana, rendaient les lieux très humides. Et raiana a donné Ariane selon P. Isnard.

Voilà peut-être de la toponymie à faire frémir nos modernes chercheurs…